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www.estuaire-gironde.frPortraits
Les habitants vous baladent
Arrivée
à bon port
Mais qui a acheté la « maison des Allemands » ? Les huit habitants du
port de Richard se posent la question en 2008, quand
Sophie Jouini
,
son mari et ses trois enfants s’installent dans l’ancien relais de poste
pour y créer des chambres d’hôtes. Après plusieurs années passées
aux Antilles puis sur le lac Léman, ils ont eu un coup de cœur pour
cette belle bâtisse de 1850 qui borde le chenal, sur la commune de
Jau-Dignac-et-Loirac. L’accueil et l’environnement facilitent l’adapta-
tion. À leur arrivée, un voisin leur offre une bouteille de Saint-Estèphe
et un bouquet de fleurs du jardin. Depuis, Sophie trouve régulièrement,
devant sa porte, un faisan, des crevettes, des légumes ou des fruits du
verger. Son fils a transformé le chenal en terrain de jeux nautiques et
sa fille aînée, désormais étudiante, constate avec surprise que le Médoc
lui manque. Même si Sophie adore lire et paresser dans son carrelet,
la jeune femme, diplômée d’une école de commerce international, ne
s’endort pas au fil de l’eau et œuvre à la découverte du territoire. Elle
propose des balades en bateau et des vols en montgolfière, grâce à son
mari, Karim, pilote d’avion et aéronaute. Avec des viticulteurs, un ton-
nelier, un restaurateur et le propriétaire d’un cabaret, elle est membre
fondateur d’une association « œnotouristique » qui organise un circuit
de visite. Membre du comité de direction du nouvel Office de tourisme
de la Communauté de Communes Médoc Atlantique, elle est décidée à
batailler pour que l’Estuaire soit au cœur de l’offre touristique.
Domaine des Prés de Joussac :
www.lpdj.euC’est l’Estuaire
qui prend l’homme
Emmanuel de Mecquenem
, 28 ans, est tombé dans le fleuve quand
il était petit. Au sens propre d’abord. Fils des responsables du do-
maine, il a grandi sur l’île Margaux avec son frère et sa sœur. Pour
se déplacer, il utilise le bateau, dès l’âge de 10 ans, et revient parfois
de l’école, située sur le continent, à la nage. Avec les scouts marins,
il a appris à retaper les bateaux en bois. Il en fera son métier, autour
du fleuve et de la mer. À 15 ans, il commence un compagnonnage
en charpente, puis suit une formation de charpentier de marine en
Bretagne. Après des expériences en Suisse, à Latresne, à Rochefort,
il travaille aujourd’hui à Pauillac, aux côtés d’un charpentier qui lui
transmet son savoir-faire dans le domaine de la restauration des ba-
teaux traditionnels. Emmanuel nous présente le bateau des années
60 dont il ponce la coque, nous montre les bordages abîmés. Il ne
peut résister au plaisir de nous faire admirer l’élégant bateau que
restaure son mentor, un « plan Fife » de 1897, du nom du chantier
naval écossais où il a été conçu. Quand on lui parle de navigation, il
regrette de ne pas avoir pris la mer plus souvent ces derniers temps,
mais il construisait sa maison. Il sourit en remarquant qu’il habite,
avec sa femme et son fils de deux ans, tout près de chez ses parents,
lui qui, adolescent, brûlait d’être indépendant et de voir du pays.
Mais l’Estuaire lui manquait, son caractère sauvage, les rapports de
solidarité entre les habitants, l’atmosphère apaisante. Et quand la
pression monte, il se ressource… sur l’île Margaux.
E. de Mecquenem est photographié par Maitetxu Etcheverria, dont le travail est exposé au
FRAC Aquitaine du 30 juin au 5 novembre, à la galerie Arrêt sur l’image du 15 juin au 13 juillet et
au Château Palmer du 4 septembre à fin décembre.
www.maitetxu-etcheverria.comL’artiste
sort du bois
Quand
Denis Tricot
annonce qu’il se destinait à être professeur d’édu-
cation physique, on lève un sourcil étonné. Dans sa maison atelier, sur
le port de Mortagne-sur-Gironde, tout parle d’art, de la tasse à café
réalisée par une amie aux pigments de couleur achetés à Istanbul, des
meubles « faits main » (la sienne) à la table à dessin couverte de cro-
quis. On comprend mieux qu’il ait décidé, à 20 ans, de construire un
bateau pour faire le tour du monde. Le grand voyage n’aura pas lieu
mais le jeune homme découvre la menuiserie. La main, l’outil, le bois,
ouvrent de nouveaux horizons à l’arrière-petit-fils d’un charpentier de
marine qui exerçait à Mortagne au 19
e
siècle. Pure coïncidence ? Denis
devient menuisier puis sculpteur, vit dans le Cantal, en prise directe
avec la nature, et revient, en 2005, dans la maison familiale de Mor-
tagne. Il est surpris d’être immédiatement repris par le paysage, par la
magie des lumières, la côte « d’en face » et la « renverse » incessante
du fleuve sur laquelle il se cale. Artiste reconnu, auteur de nombreuses
interventions à travers le monde, il pratique
« les arts mélangés »
et crée des sculptures monumentales en fils de bois, qu’il enrobe de
musique, de mots, de théâtre ou de danse pour
« poétiser les lieux ».
Toujours en recherche, il mêle dans son dernier projet, « Musique du
lieu », en collaboration avec le musicien Éric Cordier, les résonances
naturelles des sites et les sons révélés par ses arcs de bois. Le premier
enregistrement a eu lieu, évidemment, sur les bords de l’Estuaire.
www.denis-tricot.comLa dame de
Pey-Bonhomme
Ne l’imaginez pas vêtue d’une longue robe, se languissant dans la tour
du château. Quand
Rachel Hubert-Galand
grimpe sur le belvédère,
c’est en jean, parka et bonnes chaussures, pour vous faire profiter de la
vue somptueuse. D’un regard, on embrasse le vignoble, la citadelle de
Blaye, l’Estuaire immense, ses îles et la rive gauche. Un paysage que
cinq générations de vignerons ont contemplé avant elle. Le domaine
viticole de Pey-Bonhomme-Les-Tours appartient à sa famille depuis
1895 et Rachel œuvre désormais aux côtés de ses parents, avec son
frère Guillaume. Comme l’ont fait leurs aïeuls, les jeunes gens ont bien
l’intention de laisser leur empreinte sur le domaine, respectueusement
mais fermement. Poursuivant le choix de leurs parents, Rachel et Guil-
laume pratiquent une viticulture biologique et biodynamique. Exit les
désherbants, insecticides, engrais chimiques. Place aux préparations
naturelles pour enrichir le sol et soigner la vigne. Pour la fermentation,
point n’est besoin de levures et filtres qui standardisent le vin. Quant
au vieillissement, il se fait en traditionnels tonneaux mais les vigne-
rons testent aussi les amphores, qui préservent la délicatesse et la
pureté du fruit et donnent à leur chai une belle esthétique antique. Si
la méthode permet d’atteindre une qualité constante et un goût unique,
elle correspond plus largement à un mode d’agriculture et de vie, res-
pectueux de la terre et du fleuve auxquels est fort attachée cette jeune
maman, petite-fille de gabarier. La Dame de Pey-Bonhomme veille sur
60 hectares :
« C’est un petit pas pour la protection des paysages de
l’Estuaire, sourit-elle, mais si chacun fait de même… ».
www.vignobles-hubert.comSous le signe
de l’esturgeon
Évelyne Delaunay
voit des esturgeons partout. Même à Rome, au
Musée du Capitole, où elle est accueillie par un bas-relief représen-
tant le fameux poisson. Elle aimerait mieux le voir en Gironde où
l’esturgeon européen joue sa survie au fil des programmes de préser-
vation. Quand Évelyne s’installe définitivement à Chenac-Saint-Seu-
rin-d’Uzet, après une carrière de formatrice en langue, elle rencontre
René Val, fervent connaisseur de l’histoire de l’esturgeon et du caviar
dans ce petit port, qui fut un haut-lieu de la pêche et de la dégusta-
tion. À cette époque, en 2005, Pierre Bergé, propriétaire de la Maison
Prunier, vient de racheter l’ancienne Auberge du Commerce pour en
faire un musée. Intéressés, Évelyne et son mari, François, aujourd’hui
maire de la commune, créent l’association Patrimoine Saint-Seurin
en 2010. L’équipe, dynamique et passionnée, se voit confier la gestion
de l’auberge qui devient musée tout en restant inchangée, délicieuse-
ment « vintage » et conviviale. Depuis 2012, c’est un lieu d’animation
culturelle autour de l’esturgeon et de l’Estuaire : cinéma, expositions,
conférences, sorties nature, visites guidées par d’anciens pêcheurs
et Apéro-musique. Avec des moyens limités, Évelyne sait être pa-
tiente mais elle est obstinée et bénéficie du soutien de plusieurs par-
tenaires dont le Conservatoire de l’Estuaire. De nouvelles actions ont
été lancées en 2016 : la collecte et la présentation, dans une nouvelle
salle, d’objets, de souvenirs, de photos et la première Fête de l’Estur-
geon et du Caviar. Un rendez-vous de septembre déjà incontournable
sur l’Estuaire.
www.auberge-musee-caviar-esturgeon.overblog.comNon ! L’estuaire de la Gironde n’est pas une
contrée perdue peuplée de quelques vieux
pêcheurs-chasseurs troglodytes.
Rive droite, rive gauche, sur les coteaux
et dans les ports, les bourgs et les villages,
des hommes et des femmes vivent leur vie,
les enfants vont à l’école et les ados pianotent
sur leur portable. Ils vivent simplement dans
un univers qui n’est pas tout à fait ordinaire,
au rythme du fleuve, qui les habite
autant qu’ils l’habitent.
Marie-Anne Bouchet-Roy
Chemin piétonnier
de Vitrezay à Port Maubert,
le long du chenal.
www.saintfortsurgironde.frChemin du belvédère
de Mortagne-sur-Gironde
05 46 90 52 90
www.ot-mortagne.comBalade en kayak
depuis Saint-Seurin-d’Uzet
07 81 26 20 85
www.canoecharentemaritime.frAtelier Treize Ter
, 3 ter rue de la citadelle,
17120 Arces-sur-Gironde
Balade au phare de Richard
et journée dans un carrelet
, Jau-Dignac
05 56 09 52 39
www.phare-richard.comCroisière «D’îles en idylle»
,
sur l’île Margaux et l’île de Patiras,
départ de Bordeaux, Bordeaux River Cruise.
05 56 39 27 66
www.croisiere-bordeaux.comCroisière Journée des deux îles
,
sur l’île Margaux et l’île de Patiras,
départs de Blaye et Cussac,
05 57 64 63 01
www.croisieres-les2rives.comLes petits ports du Médoc
Soussans, Saint-Christoly, Macau, la Maréchale
à Saint-Seurin de Cadourne…
Route de la Corniche fleurie
,
entre Bourg-sur-Gironde et Villeneuve,
Office du Tourisme de Bourg,
05 57 68 31 76
www.tourisme.bourg-en-gironde.frPromenades dans le village de Plassac
www.plassac.frLouer un carrelet :
à Vitrezay, Pôle-Nature
05 46 49 89 89
N’allez pas croire que les Estuariens vont vous dévoiler des spots ultra secrets. En fait, chacun adore
son coin d’Estuaire, ce qui ne les empêche pas de parcourir le monde.
Evelyne Delaunay
vous conseille
de prendre de la hauteur sur les coteaux de la rive droite pour embrasser le paysage, avant de suivre
un chenal jusqu’à l’Estuaire, à Port Maubert par exemple.
Denis Tricot
parcourt presque tous les jours
le chemin du belvédère à Mortagne et pratique le kayak, depuis le port de Saint-Seurin d’Uzet. Il fré-
quente le Treize Ter, à Arces-sur-Gironde, l’atelier du sculpteur Mathieu Harzo et la galerie de la peintre
Valérie Décoret.
Sophie Jouini
évoque le port de Richard, la balade le long du chenal jusqu’au phare
et conseille vivement une journée dans un carrelet.
Emmanuel de Mecquenem
adore l’île Margaux et
les petits ports de l’Estuaire comme celui d’Issan ou de la Maréchale, à l’atmosphère reposante. Enfin
Rachel Hubert
apprécie beaucoup la route fleurie à partir de Roque de Thau où, enfant, elle grignotait
des crevettes cuites. Elle a parcouru les vignobles et les bords d’Estuaire à cheval et promène souvent
son bébé sur la digue de Plassac. Avis aux familles.
Du bonheur
d’être Estuarien
Braud et Saint Louis, La Parisienne
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Phred
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Phred
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Elle Photography Mélanie Melot
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Maitetxu Etcheverria
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Karim Jouini
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François Delaunay
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Eric Cordier